De la Jamaïque à Calais

Je continue de travailler sur les documents de Catherine. Son arrière grand père a épousé une Anglaise Ellen WINT. J’étudie, feuille après feuille, je classe, fais des plans et me lance. La nuit est tombée, il se fait tard, je dois remettre à demain.

Toujours la même monotonie, les journées succèdent et me laissent peu de temps à consacrer à mon travail. Je n’ai pas faim ce soir, un brin de toilette et je m’installe à ma table. J’ai noté qu’avant son mariage avec Georges LE PETIT, Ellen est mariée à un Anglais et vit en Angleterre à Londres puis à Ilford à quelques kilomètres de là. Son mari Francis Beckett BELLEW est issu d’une famille de militaires originaire d’Irlande. Francis est mort en mer à 39 ans. Un an après, Ellen épouse Georges.

Mariage Bellew-Wint

Elle a vécu quelques années en France dans la petite ville de Boulay en Indre et Loire avec sa mère, son beau père Dederick CHARLLESON et leurs deux enfants. Quelle place a Ellen dans cette famille recomposée ? Est-elle intégrée où est-elle la domestique comme il est noté sur le recensement de 1856 ?!

Recensement de 1856 à Boulay

Son père était militaire de carrière, elle ne l’a pas connu, elle n’avait que quelques mois quand il est emporté par la maladie.

Je suis fatiguée, les lettres dansent sur le papier, j’ai du mal à garder les yeux ouverts. Soyons raisonnable, je range mon écriture et je me couche.

Je me réveille au petit matin, je ne suis pas dans mon lit mais dans un grand lit à baldaquin en bois exotique, une moustiquaire me protège des insectes. Je sors du lit la chambre est immense, Les murs, sont recouverts d’un tissu d’une nuance de bleu que je ne connais pas, des statuettes et autres bibelots ornent avec délicatesse les meubles, le petit salon sur la droite de la pièce est recouvert d’un velours de la même teinte que les murs. Sur la gauche un petit cabinet de toilette du même bois, une cuvette et un broc en céramique finement décorés. Je cours vers la fenêtre, j’ouvre le lourd rideau et je reste pantoise devant cette vue ! Je ne suis plus à Calais, est-ce un rêve ou la réalité ? Me suis-je projetée vers cette ile des Caraïbes ? Suis-je dans la paroisse de Saint Catherine à la Jamaïque chez les ancêtres de Catherine ? Quelqu’un frappe à la porte, ouvre délicatement la porte et me demande si j’ai bien dormi. C’est une jeune métisse au magnifique sourire, elle m’apporte une jolie robe de couleur pastel et d’un tissu aussi léger que la brise qui vient de la mer. Elle me conduit à ses maîtres.

John Pusey WINT et Eliza BAILEY, les grands parents d’Ellen, sont assis sous le porche, ils profitent des quelques heures de fraicheur, toute relative pour moi, Eliza vient à ma rencontre et m’invite à les rejoindre. Tiens, je comprends et parle parfaitement la langue de Shakespeare ! Après quelques politesses d’usages, James le majordome nous fait servir un petit déjeuner anglais, John Pusey nous quitte, il doit regagner les champs de canne à sucre où des dizaines d’esclaves s’affairent. Ce n’est pas une mince affaire de diriger un domaine comme « Ryde Pen ». Eliza me parle de ses deux filles Eliza et Ann nées en Angleterre avant leur retour sur l’Ile, de ses deux fils nés dans cette paroisse John Pusey junior et William Shute. Elle connait les infidélités de son mari mais ici c’est courant John, Richard et James sont issus de ces relations. Son mari et elle sont nés en Jamaïque, son beau-père faisait du négoce entre l’Angleterre et les Iles des Caraïbes. Son mari a également des frères et sœurs de la relation de son père Samuel avec une certaine Ruth Anderson, 4 enfants tous reconnus ont complété la famille : Mary, Ann, Elizabeth et James. Son père William BAILEY est lui-même planteur dans la commune de Kingston. Elle se languit du climat tempéré de sa grande Bretagne, même celui de la France lui conviendrait mieux que cette humidité et cette chaleur permanente. Elle espère convaincre son époux. La campagne s’étend à perte de vue, des arbres dont j’ignore l’existence se dressent tout autour de la résidence et dans la forêt toute proche, des effluves de fleurs envahissent mes sens, le ciel est un bleu azur et la mer d’un bleu vert translucide. On y voit poissons, crustacés et coraux. Tous ces chants d’oiseaux, ces senteurs, cette chaleur me plongent dans une langueur proche du sommeil.

J’ai froid, je grelotte. Je suis dans mon petit lit surmonté d’étagères, ce n’était qu’un rêve. Mais durant ce laps de temps J’ai côtoyé la bourgeoisie Anglaise et j’y ai gardé sensations et souvenirs. C’est dimanche, vite, je remets des bûches dans la cheminée et je me recouche le temps que le feu diffuse sa douce chaleur dans tout l’appartement.

Je repense aux paroles d’Eliza, Les PUSEY et BUTLER sont également des familles de planteurs qui vivent dans les hautes sphères de la société Anglaise sur cette Ile. Toutes ces familles viennent d’Angleterre, d’Ecosse, d’Irlande mais comment retrouver leurs racines ?

Benjamin PUSEY et Mary BUTLER arrières-arrières-grands parents d’Ellen

Sur Facebook Catherine a retrouvé des descendants des enfants des escapades de ses aïeux. Ils vivent en Jamaïque, en Amérique, en Angleterre et en Australie. La langue n’a pas été un obstacle pour converser, partager les trouvailles, rechercher les preuves des filiations etc. Je range ce monceau de papiers de tout genre me promettant d’essayer de percer le mystère des origines des ancêtres Anglais de Catherine.

4 réflexions au sujet de “De la Jamaïque à Calais”

  1. ah, mais c’est très bien, je peux enfin mettre un commentaire. Bravo, continue…enfin, en fait tu fais comme tes aïeux tu as embauché un « nègre » pour écrire à ta place en la personne de Mademoiselle ! coquine.

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